Notre voisine, Tante Bessie, était une personne assez bizarre parfois. Elle exigeait que je l'appelle Tante Bessie, je n'ai jamais su pourquoi. Toujours habillée d'une longue jupe noire qui lui descendait jusqu'aux chevilles, elle fumait cigarette sur cigarette. Son mari était parti un beau jour, sans explications ni même un mot sur la table de la cuisine, la laissant élever seule ses trois enfants. Elle avait deux fils de seize ans, des vrais jumeaux. J'étais souvent dans l'impossibilité de savoir qui était qui, et eux en jouaient beaucoup, se marrant comme des diables quand je me trompais de personne. Leur soeur Eva était plus jeune. Pas très jolie, ni même intéressante. Elle arborait toujours deux couettes au-dessus des oreilles, ce que ses frères appelaient des "freinages d'urgence" en lui tirant dessus par derrière avec un plaisir sadique quand elle commençait à les agacer un peu trop. Et une haleine ! Ses dents gâtées exhalaient un parfum de mort, on aurait dit qu'elle avalait un cimetière tout entier chaque matin pour son petit-déjeuner.
Je pouvais aller chez eux aussi souvent que je le voulais, n'ayant même plus besoin de sonner pour entrer. On passait des après-midi entières à regarder la télévision en buvant des bières que Tante Bessie nous offrait. Enfin pour ma part je n'en prenais qu'une seule, c'était largement suffisant pour mon âge, rien qu'à la première gorgée j'avais déjà la tête qui tournait. Ses deux fils fumaient eux aussi, et ça empestait la clope dans toute la maison. Moi je ne voulais pas toucher à ça, même si une fois j'ai voulu essayer. Je n'ai jamais autant toussé de ma vie, devant les autres qui se marraient à s'en tordre les boyaux. "Tu ne seras jamais un homme mon pauvre Davy" m'a dit Tante Bessie. Je préférais largement ne jamais devenir un homme plutôt que d'avoir ce goût de merde dans la bouche et mes yeux larmoyants, en plus d'une toux impossible à arrêter.
Le lendemain de ma rencontre avec Mélanie je suis allé chez eux, comme pratiquement tous les jours. Tante Bessie avait ses clés de voiture à la main. Mélanie descendait les escaliers du premier étage, un grand sourire sur ses jolies lèvres.
- Tiens, Davy ! s'est exclamée Tante Bessie. Les enfants et moi nous allons faire un petit tour en ville. Ça te dit de venir avec nous ? Quant à toi Mélanie chérie, je t'ai fait la liste de toutes les choses à accomplir avant midi. J'espère qu'à notre retour tu auras terminé, je ne voudrais pas être obligée de te gronder. Ce serait si
inopportun après la mort de tes parents. Et ne t'empiffre pas dès que j'aurai le dos tourné, ce serait tellement dommage que tu deviennes grosse.
Elle a dit ça d'une voix très calme, très posée, presque doucereuse, mais on y sentait tellement de menaces que je ne savais plus quoi penser.
Et nous sommes partis, laissant Mélanie à toutes ses corvées.
A notre retour, elle était en train d'étendre du linge dehors. Le vent a fait s'envoler une serviette qui est retombée sur la terre de la cour. Tante Bessie s'est précipitée sur la jeune fille.
- Regarde ce que tu as fait petite sotte, cette serviette est bonne a être relavée. Tu as donc deux mains gauches pour ne pas savoir faire une chose aussi simple que mettre du linge sur un fil ?
- Mais, Tante Bessie
- Il n'y a de "mais" qui tienne. Mais qu'est-ce que je vais faire de toi ma pauvre fille ?
- Je...
je suis désolée.
- Tu es désolée ? Et moi je dois être quoi si toi tu es dé-so-lée ? Tu en as certainement fait tomber d'autres n'est-ce pas ? Allons, dis-le moi ! Et puis zut, tu vas me faire le plaisir de reprendre tout ce linge et le relaver, tu m'as bien comprise ?
Mylène a baissé la tête et a prononcé un timide "Oui tante Bessie".
Moi je ne savais plus où me mettre, mais les deux garçons avaient un sourire narquois sur leur visage. Quant à Eva, elle chantonnait.
Je suis rentré chez moi retrouver l'ambiance familiale tellement réjouissante, et je me suis enfermé dans ma chambre.
En pensant à Mélanie et la façon dont Tante Bessie se comportait avec elle.
Hélas, ce n'était que le début de son long calvaire.
La soirée s'est passée comme souvent à la maison, terne et morose, mon père évitant le regard de ma mère, le nez plongé dans son journal devant la télévision, en sirotant son whisky, puis dans son assiette quand il a été l'heure de passer à table. Je vous l'ai dit, une ambiance follement réjouissante !
Je suis retourné dès le lendemain matin chez Tante Bessie. En ouvrant la porte, j'ai entendu des rires au premier étage. J'ai vite grimpé les escaliers, et les deux garçons chatouillaient Mélanie dans un coin de leur chambre. Je les ai regardés faire, un peu jaloux néanmoins. Puis l'un des jumeaux s'est permis d'aller un peu plus loin. Il a mis ses mains sur ses seins. Elle lui ordonnait d'arrêter immédiatement son manège, mais l'autre s'enhardissait encore plus. Alors elle lui a donné une bonne gifle. Il en est resté abasourdi. Tante Bessie est arrivée du rez-de-chaussée et a demandé, toujours de sa voix si calme et si posée :
- Au nom du ciel, est-ce que quelqu'un pourrait m'expliquer ce qui se passe ici ?
- Rien M'man, on faisait juste que rigoler, et tout d'un coup elle m'a donné une gifle.
- Oooh, voyez-vous ça. Tu te permets de gifler mes enfants maintenant ?
- Il
il me touchait les seins. Je me suis énervée, c'est tout.
- Il te touchait les seins ? Mais ma pauvre petite, n'importe quel garçon aurait envie de faire ça. Regarde comment tu es habillée, avec ce short ridicule qui les excite. Ce ne sont que des garçons après tout, à quoi tu t'attendais ? Tu n'as donc que ce que tu mérites. Allez, va t'habiller mieux que ça.
Mélanie est allée dans sa chambre, et on a entendu un hurlement. On s'est tous précipité pour voir ce qui lui arrivait. Eva avait mis une grosse araignée noire sur son lit. Une araignée en plastique. Mélanie avait horreur des araignées, et sur le coup elle avait crû que c'en était une vraie.
- Et bien voici une grande leçon sur la féminité les enfants, nous a expliqué Tante Bessie. Cette chère Mélanie est une sensible, comme toutes les femmes. Parce que tu es bien une fille non, petite Mélanie ? Et moi, est-ce que tu crois que je suis une fille ? Crois-tu que je suis comme toi, si belle et si jolie, avec de si beaux atours ? Crois-tu qu'un homme aurait envie de me toucher les seins ? Non, bien sûr que non.
- Ma tante, vous êtes encore très jolie, vous
vous
- Vous quoi, petite effrontée. Tu crois vraiment qu'un homme pourrait encore me faire la cour ? Sale petite garce, arrête tes insinuations perfides et va plutôt préparer le dîner de ce soir.
Et puis elle s'est tournée vers nous.
- Les enfants, descendons regarder la télévision. Je meurs de soif, ça vous dis une petite bière ?
Nous sommes descendus regarder leur foutue télévision, et Tante Bessie a continué de caqueter sur la condition féminine, ces pauvres êtres sans défenses à qui il fallait absolument montrer le droit chemin.
Ce que je n'arrivais pas à saisir, c'était pourquoi ce droit chemin ne devait être dévoilé qu'à Mélanie, et pas à Eva.
J'ai dormi chez eux ce soir là, comme il m'arrivait souvent de le faire. Je n'arrêtais pas de penser à Mélanie, à sa vie chez sa tante, dans cette maison où nulle chaleur humaine ne pouvait la rendre heureuse. J'en étais bien triste, mais que pouvais-je y faire ?
Je me suis levé le lendemain vers huit heures, et elle était déjà dans la cuisine, en train de balayer. Les autres dormaient encore. Je me suis préparé un grand bol de café noir, en y trempant ces fameux biscuits auxquels mon père avait l'air de tant tenir. Nous avons discuté à voix basse, et comme elle ne mangeait rien, je lui ai demandé si elle n'avait pas faim.
- Tante Bessie ne veux pas, elle me trouve trop grosse. Elle me déteste. Tout le monde me déteste ici. Elle critique tout ce que je fais.
Ses yeux étaient rougis, comme si elle avait pleuré toute la nuit.
- Mais non, tu n'es pas grosse du tout, au contraire, je te trouve même
Je n'ai pas trouvé le mot approprié.
- Et puis moi je ne te déteste pas tu sais, bien au contraire.
- Tu sais David, papa me disait toujours ce qu'il fallait faire. Il me disait souvent qu'il fallait être fort dans la vie, que c'était à chacun de nous de prendre les bonnes décisions, et lui m'aidait à savoir laquelle choisir. Il disait que c'était comme si nous étions sur une calèche tirée par un cheval, et que c'était nous qui choisissions s'il fallait tourner à droite ou à gauche, ou s'il valait mieux aller tout droit. Ce n'était jamais le cheval qui décidait à notre place, mais nous qui tenions les rênes. C'est maintenant que je comprends ce qu'il voulait dire. Seulement je ne sais plus que faire, il... il n'est plus là tu comprends ? Et il me manque tellement, oh David, mes parents me manquent tellement !
Des larmes commençaient à couler sur ses joues. Je l'ai prise dans mes bras pour la réconforter, maladroitement, comme j'avais vu mon père le faire avec ma mère, et c'est à ce moment là que Tante Bessie est entrée dans la cuisine.
- Regardez-donc ce touchant tableau. Et bien mon petit Davy, te voilà bien sensible toi aussi. Au fait Mélanie, pourrais-tu aller nettoyer le poulailler ? J'aimerais que tu y ailles tout de suite, si bien sûr cela ne te dérange pas. Tu as l'air si occupé !
Mélanie a baissé la tête, a murmuré un "oui, tante Bessie", et est sortie de la maison. Quant à moi, j'étais rouge jusqu'aux oreilles d'avoir été surpris avec Mélanie dans mes bras.
Mais pour rien au monde je ne regrettais mon geste. Et je suis persuadé que Mélanie en a trouvé un certain réconfort, si minime soit-il.
J'ai passé la journée avec ma mère en ville. Elle voulait m'acheter des vêtements pour la rentrée des classes. Ensuite elle m'a emmené dans un Mc Donald's puis nous sommes allés au cinéma voir "La tour infernale", qui repassait à "L'éden Movie". J'ai adoré, ma mère beaucoup moins. J'aimais beaucoup ces instants merveilleux où nous n'étions rien que nous deux, à discuter de choses et d'autres.
Mais je ne lui ai pas parlé de Mélanie ni de la vie que Tante Bessie lui faisait subir.
Je n'ai jamais cessé de le regretter amèrement, parce que les choses auraient certainement pris une autre tournure si je l'avais fait.
Après le dîner j'ai demandé à mes parents si je pouvais aller chez Tante Bessie et dormir chez eux. Ils m'ont donné leur accord, et j'ai foncé chez eux, tout heureux de revoir Mélanie.
En entrant, je n'ai trouvé personne. Mais j'ai entendu des bruits venant de la cave. Enfin ce n'était pas vraiment une cave, plutôt une grande remise servant à ranger tout un bric à brac. J'ai ouvert la porte, descendu les escaliers, et j'en suis resté les yeux grands comme des soucoupes.
Mélanie était attachée à des cordes par les poignets. Les cordes passaient au-dessus d'une poutre, si bien qu'elle avait les bras levés. Ses poignets étaient tout bleus. Ils avaient tellement tiré sur les cordes qu'elle devait se tenir sur la pointe des pieds. Et on lui avait mis un bandeau sur les yeux et un bâillon sur la bouche. Elle portait un corsage rose et ce mini short en coton qui avait tant excité les jumeaux, je m'en souviens très bien.
- Aaah ! Mon petit Davy, tu tombes bien s'est exclamée Tante Bessie. Nous allions juste commencer le jeu. Assieds-toi Davy.
Mais je restais les bras ballants, estomaqué de voir ce qu'ils étaient en train de faire.
- J'ai dit assieds-toi Davy ! Nous devons faire parler cette petite dévergondée, c'est la règle du jeu. Tu veux bien parler Mélanie chérie ?
La pauvre sanglotait, en agitant la tête de droite à gauche.
- Tu sais Davy, les filles sanglotent toujours, pour un oui pour un non, et ça, on ne peut rien y faire. Tout ça c'est pour son bien.
Je n'arrivais toujours pas à dire quoi que ce soit.
- Enlevez-lui son bâillon mes garçons. Je crois qu'elle est prête pour sa confession. Alors Mélanie, tu veux bien nous faire ta confession ?
Mélanie hurla.
- MAIS Y A PAS DE CONFESSION ! Y A PAS DE CONFESSION ! Détachez moi, je vous en priiie
David, oh David, est-ce que tu es là toi aussi ?
Elle avait une grosse bulle de morve qui lui sortait du nez et continuait à sangloter.
L'un des jumeaux décida une chose affreuse.
- Je veux qu'on la déshabille. Tu veux bien Maman ?
- Bien sûr, quelle question ! C'est le jeu après tout.
Il s'approcha de Mélanie, sortit un couteau de sa poche pour découper le corsage et trancha la bretelle de son soutien-gorge. Puis il s'accroupit et descendit le short.
- Attention, pas de coup de pieds sinon... !
Il déchira la culotte, qui tomba sur le sol.
Mélanie se retrouva nue devant nous tous, Tante Bessie assise dans un vieux fauteuil en fumant sa cigarette pour contempler le spectacle.
Le garçon mit sa main sur la cuisse blanche de Mélanie.
- Enlève tes pattes de cette fille, ordonna Tante Bessie. Les filles comme elle sont des dégueulasses. Je ne veux pas que tu y touches. Tout du moins, pas maintenant. Bien, puisque qu'elle ne veut pas nous faire sa confession les enfants, allons boire quelques bières.
Elle remit le bâillon à Mélanie, et on remonta dans la cuisine. Je n'en menais pas large devant la folie de cette famille, ça allait beaucoup trop loin, mais encore une fois je n'ai rien dit. Je suis resté avec eux, sans même penser courir chez mes parents pour les dénoncer. Les jumeaux me demandèrent si je croyais que cela faisait mal à Mélanie d'être ainsi attachée. J'ai répondu "oui, peut-être", puis je n'ai plus décroché un mot de toute la soirée.
Mais j'ai très mal dormi cette nuit là, me sentant coupable de lâcheté.
Quand je me suis levé le lendemain, je suis vite descendu à la cave. Mélanie n'était plus entravée, elle était assise sur un lit surmonté d'un vieux matelas, et Tante Bessie la forçait à manger.
- Allons Mélanie chérie, mange ta tartine, disait-elle en mettant le pain contre sa bouche.
Elle essaya de répondre, en balbutiant.
- Je...
je ne peux pas, j'ai les
les lèvres trop
gercées, j'ai...
j'ai soif.
Tante Bessie lui donna une grande gifle. Sa tête cogna violemment contre le mur et se mit à saigner.
- Mange cette foutue tartine. Je ne l'ai pas préparée pour rien !
Mélanie essaya de manger sa tartine, bouchée après bouchée.
- C'est bien petite Mélanie chérie, tu es une bonne fille.
Les jumeaux et Eva descendirent à ce moment là. Moi je suis remonté pour aller aux toilettes et vomir dans le lavabo.
En redescendant dans la remise, j'ai vu l'un des garçons sur Mélanie. Je me suis demandé ce qu'il fabriquait comme ça sur elle. Les ressorts du lit couinaient à chacun de ses mouvements. Et puis j'ai compris, quand j'ai vu son pantalon baissé. Les autres étaient assis, Tante Bessie tirant sur son éternelle cigarette.
- Tu sais Davy, une femme ne s'offre jamais toute entière, elles veulent juste que les hommes entrent dans un endroit très précis. Tu vois ce que je veux dire ? Non bien sûr, tu es bien trop jeune. Ma chère Eva non plus ne comprend pas, n'est-ce pas Eva ? Mais tu verras ça plus tard, tu as bien le temps.
L'autre se releva, en rajustant son pantalon. Son frère voulait aussi en profiter.
- C'est à mon tour Maman, laisse-moi la sauter.
- Quoi ? Tu veux vraiment répandre ta semence dans celle de ton frère ? Allons chéri, ça ne se fait pas voyons. Ce ne serait pas très convenable, juste après lui.
- Je t'en prie Maman, laisse-moi la sauter moi aussi.
Tante Bessie réfléchit quelques secondes, un doigt sur la tempe.
- Hummm... bien, pourquoi pas ?
Et il fit de même. Mélanie avait les yeux grands ouverts, allongée sur le lit, dans un état d'hébétude, un gros hématome sur le front, la figure sale, les cheveux poisseux.
- Voilà à quoi tu sers chérie, un réceptacle pour assouvir les instincts dégueulasses des hommes.
Le garçon, quand il eut terminé, décida autre chose toujours plus abominable.
- Je veux la couper.
- Tu veux la couper bébé ?
- Oui, pour que cette sale pute soit défigurée et que plus personne n'ait envie d'elle.
Là, j'ai enfin ouvert la bouche.
- Mais vous ne pouvez pas faire ça, c'est
c'est mal !
- Je crois que si Davy chéri, les garçons en ont envie. Et puis évite de me dire ce qui est bien ou mal petit. Garde ta morale pour toi. Tu trouves ça injuste pour cette garce ? Mais personne n'a jamais dit que la vie était juste. Tiens, j'ai une autre idée. Et si on la brûlait ? Si on inscrivait sur sa chair que cette fille est une sale pute ?
Ils trouvèrent que c'était une excellente idée.
Alors elle prit un vieux clou rouillé et le chauffa avec un petit chalumeau à gaz.
Je n'en pouvais plus de hurler pour qu'elle arrête.
- Si tu ne veux pas voir ça sale petit con, tu n'as qu'à fermer les yeux. Tenez-moi cette fille, pour qu'elle ne se débatte pas.
J'ai fermé les yeux, et j'ai entendu le grésillement de la chair qui brûlait, les hurlements de souffrance de Mélanie, ses pleurs, ses sanglots, ses supplications inutiles.
- Et voilà petite Mélanie, tu es marquée à jamais, plus aucun homme ne voudra de toi désormais. Tu te croyais jolie, mais c'est terminé. Terminé, tu m'entends ?
Elle avait écrit en gros caractères, sur son ventre, "sale pute".
Ça sentait la chair brûlée dans la pièce, une odeur écurante.
- Il faut cautériser la plaie. Eva, tu veux bien t'en charger ?
La petite fille, d'à peine douze ans, prit le chalumeau en main et passa la flamme sur les plaies. Mélanie hurlait, hurlait, hurlait...
J'ai voulu me sauver en montant les escaliers quatre à quatre, mais l'un des jumeaux m'a rattrapé.
- Et où tu crois aller comme ça petit Davy ? Le jeu n'est pas terminé. Attachez ce petit con, il a l'air de tellement bien s'entendre avec cette
chose.
- Mes parents viendront, ils viendront et mon père vous dénoncera. Il vous dénoncera et vous finirez vos jours en prison.
- Ha ha ha, ce coureur de jupon ? Mais il se fout complètement de toi mon petit Davy.
Et ils sont tous remontés.
J'étais là sur le sol de terre battue, les mains attachées dans le dos et les pieds liés. Mélanie gémissait sur le lit. Je me suis contorsionné comme un serpent et j'ai trouvé une pelle dans un coin sombre de la remise. J'ai coupé mes liens avec le tranchant. J'ai mis un temps fou, mais j'y suis arrivé. Ces idiots n'avaient même pas pensé à l'enlever. Je me suis approché de Mélanie et je me suis couché à côté d'elle, en la recouvrant d'une vieille couverture pour cacher sa nudité. Elle pleurait doucement, en tremblant de tout son corps. Je lui ai caressé le visage. Elle essayait de me dire quelque chose. Ses lèvres étaient toutes crevassées, avec des ecchymoses et du sang plein la figure.
-C'est... c'est toi David ? C'est bien toi ? J'ai cru... j'ai cru que tu étais un rêve. Un rêve. Je... je fais plein de rêves tu sais, et ils s'envolent. Pourquoi elle me fait tout ça, hein, pourquoi ? Tu vas rester avec moi David ? Tu vas t'occuper de moi n'est-ce pas ?
Sa voix était si faible que je l'entendais à peine. J'avais les larmes aux yeux, et je lui ai serré la main, très fort.
- Oui Mélanie, je... je m'occuperai de toi.
- Tu me le promets ? Je veux m'en sortir. Je t'aime David, je... je t'aime.
Et elle ferma les yeux.
- Oh non
non
ne meurs pas, je t'en supplie, ne meurs pas. Oh nooon...
La porte s'est ouverte. Je suis vite redescendu du lit, attrapé fermement la pelle des deux mains, et j'ai attendu derrière le mur, au pied de l'escalier. C'était Tante Bessie qui revenait. Quand elle a été tout près, le lui ai donné un grand coup sur la tête, en plein front. Elle s'est effondrée comme une masse. J'ai remonté les escaliers à toute vitesse, foncé chez mes parents, et appelé la police. Ils ne comprenaient rien à ce que je leur racontais. J'ai essayé de me calmer, et ils ont enfin compris. Ma mère se demandait ce qui pouvait bien se passer, à m'agiter comme ça. Ils sont arrivés dix minutes plus tard, avec une ambulance. Tante Bessie a été emmenée dans la voiture du shérif, toujours inconsciente et le nez cassé, avec ses trois enfants. Mélanie a été transportée de toute urgence à l'hôpital.
Elle allait s'en sortir, elle ne pouvait que s'en sortir, je priais de toutes mes forces pour qu'elle s'en sorte.
Je ne l'ai jamais revue. Mes parents me l'ont formellement interdit. Elle avait besoin de soins et de repos, dans une maison spécialisée. Autrement dit, un asile.
Elle est morte neuf mois plus tard.
Voilà la triste histoire de Mélanie, et que Dieu me pardonne si je n'ai pas fait ce qu'il fallait pour la sauver.