Je sens que l'on m'emmène sur un chariot. On doit être dans une salle, il y a plusieurs voix autour de mon nouveau domicile. Ha ha ha, elle est bien bonne celle-là. Mon nouveau domicile ! Mais....mais c'est mon fils que j'entends ! Il pleure. Oui il pleure. Et sa mère qui essaie de le consoler. Ho non bonhomme, pleure pas. Ton papa n'est pas mort, il est là, à côté de toi. Je pleure aussi, à chaudes larmes, mais c'est trop tard, personne ne relèvera le couvercle de mon cercueil pour voir que j'ai le visage inondé de larmes, et que je pleure en silence, sans le moindre petit mouvement. Je suis comme paralysé, non, rectification, je SUIS paralysé. Je voudrais tellement le serrer dans mes bras, lui dire combien je l'aime, l'embrasser encore et encore. Mais non, je ne le pourrai pas, j'essaie de crier, de toutes mes forces j'essaie de crier, mais il n'y a rien à faire.
Boum !
"Papa, papa, reviens papa, t'es pas mort papa, je veux encore te voir !" C'est Sylvain qui s'est jeté sur le cercueil et s'est écroulé dessus. Pitié, arrêtez ce supplice ! J'entends mon fils à cinquante centimètres de moi et je ne peux pas lui dire que je suis vivant. C'est atroce. Mes pleurs redoublent, je sens mon coeur qui se serre de chagrin, je ne veux plus entendre mon bonhomme crier sa douleur.
Je l'entends encore, mais plus loin. Il doit être blotti dans les bras de sa maman, il sanglote, et elle essaie de le consoler, en surmontant sa peine. Et nous continuons de pleurer...
On m'emmène de nouveau, et puis j'entends faiblement une personne qui parle, et des chants. On doit être dans une église. J'assiste à mon propre enterrement, c'est complètement dingue ! La messe est terminée, je suis dans un fourgon mortuaire. On s'arrête. C'est certainement le cimetière maintenant. Je sens qu'on me descend dans un trou, j'entends des gens parler à voix basse, et le raclement des cordes autour du cercueil quand ils le descendent au fond. Et la terre que l'on jette dessus, avec des pelles, une montagne de terre au-dessus de moi.
Ma mort sera atroce, à petit feu. Je n'aurai pas vécu bien longtemps. J'avais tellement de projets à réaliser.
Je commence vraiment à étouffer.
Je panique, je suis complètement affolé. Ca va durer combien de temps ? Quelques heures, une journée, plusieurs jours ?
Le plus terrible dans tout ça, c'est que je sens mes membres se dégourdir, revenir à la vie, j'ai réussi à remuer un doigt mais vraiment pas grand-chose. Je n'arrive pas encore à bouger les lèvres, encore moins à hurler que je suis vivant. Bientôt il sera trop tard, tout le monde sera parti quand je me mettrai à gratter le couvercle de mon cercueil, les doigts en sang, à hurler comme un dément.
J'ai encore une dernière pensée avant de sombrer dans la folie, une seule phrase qui martèle mon esprit : Claire, Sylvain, je vous aime, je vous aime, je vous aime, je vous aime...
auteur : mario vannoye
le 03 septembre 2007